Jacques Hadamard (8 décembre 1865 [Versailles] - 17 octobre 1963 [Paris])
S'il est bien un prototype du savant distrait, c'est bien le mathématicien Jacques Hadamard, dont le dessinateur Christophe se serait largement inspiré pour créer son Professeur cosinus. Jacques Hadamard est né le 8 décembre 1865 à Versailles. Il réalise des études secondaires très brillantes, surtout en latin et en grec, un peu moins en mathématiques les premières années. Il est reçu premier à l'École Polytechnique, avec le total de points le plus élevé jamais réalisé jusque-là, et à l'École Normale Supérieure. Il opte pour cette dernière. Agrégé en 1887, il est nommé professeur à Paris, mais il a des difficultés pour se mettre au niveau de son public lycéen, qui compte pourtant en son sein Maurice Fréchet. Cette charge ne l'empêche pas de rédiger une très brillante thèse, soutenue en 1892, où il étudie les séries de Taylor et les fonctions analytiques. C'est dans cette thèse notamment qu'apparait pour la première fois la formule dite de Hadamard pour le calcul du rayon de convergence d'une série entière. 1892 est aussi l'année où Hadamard épouse Louise Trénel, avec qui il aura 5 enfants.
Dès 1891, Hadamard est nommé maître de conférences à Bordeaux. En 1896, la théorie des fonctions analytiques qu'il a lui-même contribué à développer connait un succès retentissant : Hadamard démontre, en même temps que le belge de la Vallée-Poussin, que le nombre de nombres premiers inférieurs ou égaux à $n$ est équivalent à $n/\ln n$ quand $n$ tend vers $+\infty.$ C'est un résultat d'une portée considérable.
En 1897, Hadamard rentre à Paris, nommé maitre de conférences à la Sorbonne. C'est le moment où en France l'affaire Dreyfus prend toute son ampleur. Hadamard est un Dreyfusard convaincu et pour cause puisque sa petite cousine Lucie est l'épouse du capitaine Dreyfus. A Paris, les travaux mathématiques d'Hadamard sont toujours riches et variés. Il est difficile de retenir tous les domaines où il a contribué, mais citons parmi les principaux :
- les fonctions analytiques et leurs applications à l'arithmétique.
- les équations différentielles et leurs applications.
- les équations aux dérivées partielles, et leurs applications à la Physique Mathématique.
- le calcul des variations.
Parallèlement, Hadamard anime un séminaire très vivant qui formera toute la première génération des Bourbakistes.
Les nominations prestigieuses se succèdent alors au rythme des découvertes majeures : Collège de France, École Polytechnique, Académie des sciences. Mais aux dires mêmes de Hadamard, c'est la Première Guerre Mondiale qui vient faucher une vie particulièrement heureuse : il y perd en effet deux de ses fils. Et s'il surmonte cette épreuve en travaillant tant et plus, la Seconde Guerre Mondiale lui enlève son troisième fils.
Hadamard était unanimement apprécié par ses collègues. En 1950, il est Président d'honneur du Congrès international des mathématiciens qui doit se tenir aux États-Unis. Mais en ces temps de guerre froide, Hadamard est jugé indésirable par les autorités américaines. Il faudra tout le lobbying des mathématiciens américains de l'époque pour qu'il obtienne son visa.
En 1951, il publie son dernier mémoire. Il décède le 17 octobre 1962, quelques mois après son épouse et un de ses petits-fils.