Louis Joel Mordell ( 28 janvier 1888 [Philadelphie] - 12 mars 1972 [Cambridge])
Louis Mordell est le fils de juifs lituaniens, émigrés aux Etats-Unis dans les années 1880. Sa passion pour les mathématiques commence à l'âge de 13 ans, et il achète dans une librairie des livres d'occasion. Parmi ces livres, il y a des annales du concours d'entrée à Cambridge, et pour Mordell cela deviendra vite une obsession : entrer à Cambridge, pour y étudier les mathématiques. En attendant, il complète ses études secondaires à Philadelphie (il est si brillant en mathématiques que ses camarades l'ont surnommé "X,Y,Z") et s'instruit de lui-même en étudiant notamment de nombreux livres d'algèbre.
Louis Mordell traverse l'Atlantique en décembre 1906. L'idée de passer le concours d'entrée de Cambridge est un peu folle, alors qu'il est essentiellement autodidacte et qu'il n'a aucune idée des exigences du concours. Mais il le réussit brillamment et réside en Angleterre à compter de cette date (il devient même citoyen britannique en 1929).
Dans l'éventail des mathématiques, l'intérêt principal de Mordell se porte sur la théorie des nombres. Il y obtient un premier succès retentissant, en 1913, dans l'étude de l'équation diophantienne $x^2=y^3+k$. Il prouve que, pour de nombreuses valeurs de $k$, cette équation n'admet qu'un nombre fini de solutions entières. En fait, ces résultats complètent des travaux que Thue avait réalisés quelques années auparavant, et à eux deux Mordell et Thue ont prouvé que cette équation a toujours un nombre fini de solutions. Mordell n'était malheureusement pas au courant du résultat de Thue à cette époque.
Après avoir échoué à devenir professeur à Cambridge, Mordell enseigne au Birbeck College de Londres. Pendant la Première Guerre Mondiale, il sert comme statisticien au Ministère des Munitions, avant de devenir, en 1920, professeur à Manchester. C'est là qu'il réalise ses meilleurs travaux. Il résout notamment une conjecture de Poincaré, prouvant que le groupe des points rationnels d'une courbe elliptique est toujours finiment engendré. Avec Davenport, il réalise de nombreux progrès en géométrie des nombres.
En 1945, il obtient (enfin !) une chaire à Cambridge, avant de cesser d'enseigner en 1953. Ceci ne signifie pas pour autant que Mordell se retire des mathématiques, puisqu'il écrira encore une centaine d'articles, et voyagera beaucoup, au gré d'invitations dans des universités ou des colloques. Sur le plan du caractère, Mordell était connu pour être un individualiste (un seul de ses articles est écrit en collaboration avec un autre mathématicien), mais très respectueux des autres, et n'hésitant pas à aider avec beaucoup de générosité ses jeunes collègues. Il décède le 12 mars 1972, quelques mois après avoir entrepris un long voyage passant par Moscou, Léningrad et l'Asie.