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#1 02-11-2022 06:24:33
- Spike
- Invité
Difficulté des exercices de la collection Phare MPSI
Bonjour à toutes et à tous,
Je suis diplômé d'une école d'ingénieur en maths appliquées de rang A, où j'ai pris beaucoup de plaisir durant mes cours, mais je garde une forte passion pour les mathématiques théoriques et abstraites de prépa. Dans le cadre de mes révisions personnelles en mathématiques, j'ai pour objectif de récupérer le niveau d'un bon élève de MPSI (puis pourquoi pas d'un bon MP, dans un second temps). J'ai décidé pour ce faire de reprendre le programme de MPSI dans son entièreté à l'aide des sites Bibmath (excellent site soit-dit en passant :)) et Mathfrance (gratuit jusqu'à très récemment).
J'ai aussi pour ce faire acheté les livres de la collection phare Ellipse: Emmanuel Goldsztejn, et Ellipse: khôlles de maths, exercices corrigés de plusieurs auteurs dont Eric Billault (livre blanc). En les travaillant, je me rends compte que mon niveau est légèrement inégal selon les chapitres, mais surtout, ce qui "m'inquiète" le plus, que je galère sur 2 exercices sur 3, voire plus. J'ai parfois de bonnes intuitions, de bons automatismes, mais parfois certains exercices me paraissent juste très durs et non intuitifs (par exemple, dans un exercice où il fallait montrer une égalité de sommes de sommes de matrices, il fallait penser à introduire n applications linéaires et montrer qu'il s'agissait d'automorphismes pour pouvoir avancer; ou dans un autre exercice où l'on se doute bien qu'il faut appliquer le théorème de Rolle, la fonction auxiliaire à construire est quasiment impossible à deviner).
Ayant malheureusement travaillé essentiellement en solo durant ma prépa, et ayant été dans une top prépa parisienne, dans le dernier tiers de classe, je n'ai aucune notion de comparaison pour apprécier le niveau requis pour être dans l'équivalent du premier tiers de classe.
Si l'on ne tient pas compte des génies (2 ou 3 par classe voire par promo), quel est le niveau médian d'un élève du premier tiers en math? Justement, par rapport au références que j'ai citées, qui sont des oraux des Mines / Centrale / X adaptés au programme de sup, est-ce que ces élèves sont capables de littéralement "torcher" les exercices un à un, en une dizaine de minutes tout au plus chacun, ou bien, est-il normal, même pour eux, de galérer 2 fois sur 3 sur ces sujets de khôlles et d'oraux, qui, peut-être, le jour J, sont accompagnés d'indications de la part de l'examinateur?
Je prends comme référence les livres de la collection Phare car je les connais bien et ai eu l'occasion de les retravailler récemment. En espérant que vous les connaissez également! Vos réponses me permettront d'apprécier le chemin qu'il me reste à parcourir pour atteindre mon objectif en sup, avant de songer d'entamer le programme de spé.
D'avance merci pour vos réponses et excellentes soirée!
#2 02-11-2022 07:52:34
- Fred
- Administrateur
- Inscription : 26-09-2005
- Messages : 7 181
Re : Difficulté des exercices de la collection Phare MPSI
Bonjour,
Je n'ai jamais été dans une prépa parisienne (juste dans une "bonne" prépa de province), et mon activité d'enseignement actuel me fait fréquenter des étudiants qui sont très loin d'avoir le niveau des élèves des prépas parisiennes. Mais je vais te répondre justement avec mon expérience d'enseignant et de professionnel des mathématiques.
Il y a beaucoup d'exercices plus ou moins classiques de prépa qui sont selon moi, tels qu'ils sont posés, juste impossibles à faire pour un étudiant, sauf s'il avale des dizaines et des dizaines d'exercices et qu'il finit par connaitre les exercices par coeur. Ces exercices reposent ou bien sur une astuce très difficile à deviner, ou sur un point des mathématiques pas au programme qui la rend naturelle.
Je pense qu'il y a une part non négligeable d'étudiants des grandes prépas parisiennes qui sont formatées depuis l'entrée au lycée pour aller en prépa, en fréquentant des classes spécifiques, de niveau, dont les exigences dépassent de beaucoup les programmes. Evidemment, pour ces étudiants, c'est beaucoup plus facile d'assimiler le cours, parfois parce qu'ils l'ont fait en avance, et de pouvoir ingurger une tonne d'exercices.
Je vais prendre juste un exemple. Dans le Gourdon, l'exercice est posé sans indication : il est juste écrit je crois qu'il faut trouver un équivalent de $u_{n+1}=\sin(u_n)$. Qui peut penser à introduire la série
$\frac1{u_{n+1}^2}-\frac 1{u_n^2}$???? Dans l'énoncé donné sur Bibm@th, on comprend déjà mieux pourquoi. Et en fait on comprend encore beaucoup mieux si on lit cet exercice. Moi, je trouve ridicule de poser l'exercice de trouver un équivalent de $u_{n+1}=\sin(u_n)$ sans indications. On ne teste ni l'inventivité, ni la compréhension d'un étudiant, mais juste le fait de savoir s'il a déjà fait cet exercice et s'il s'en souvient. Bien sûr, à l'oral, cela peut avoir un sens, car le correcteur peut moduler facilement ses indications.
A+
F.
Hors ligne
#3 02-11-2022 17:51:28
- Spike
- Invité
Re : Difficulté des exercices de la collection Phare MPSI
Cher Professeur,
Cher Professeur, merci beaucoup pour votre réponse.
Donc en se basant sur votre expérience d'enseignant et de professionnel des mathématiques, je ne devrais pas m'inquiéter de ne pas être en mesure de deviner ce genre d'astuces très difficiles qui semblent souvent parachutées?
Est-ce que, selon vous, les bons élèves de prépa parisienne (les élèves classés dans le premier tiers, en excluant les 2 ou 3 génies qui sortent du lot) sont dotés d'une intuition supplémentaire qui fait qu'ils parviennent à "naturellement" deviner ces astuces, ou bien peut-on affirmer, de façon quasi certaine, que s'ils parviennent à résoudre le genre d'exercice que vous avez mentionné, c'est parce qu'ils l'ont déjà vu auparavant?
Bien Cordialement,
Spike
#4 02-11-2022 22:15:55
- yoshi
- Modo Ferox
- Inscription : 20-11-2005
- Messages : 17 128
Re : Difficulté des exercices de la collection Phare MPSI
Bonsoir,
Ton post m'amène à une question :
Mathématiquement parlant, qu'est que l'intuition pour toi ?
Et comme on dit souvent que poser une question, c'est déjà y répondre, je vais te dire ce que moi, enseignant de Collège retraité, je vais te dire ce que j'en pense.
Pour moi, l'intuition, c'est quelque chose qui n'est pas (ou vraiment très rarement) inné...
D'abord, les exercices te permettent de constituer une "banque de données" que tu vas stocker dans ta mémoire.
Puis ton cerveau va développer sans que tu t'en rendes compte une faculté de raccourci qui va lui permettre un tri ultra rapide dans les données stockées doublée d'un mécanisme de comparaison (de rapprochement entre les techniques de résolution voisines) qui va faire que tu auras l'idée (l'intuition ^_^) de ce que tu dois faire...
La difficulté d'un exercice résidant dans le nombre de questions intermédiaires absentes, il est pour moi évident que l'intuition n'est rien ont pu être déjà rencontrés et mémorisés.
Je suis joueur d'échecs, je résous (ou tente) un problème différent chaque matin. Chaque position est différente...
Pour certaines, j'ai la solution quasi instantanément parce que mon cerveau reconnaît une structure minimum, un technique associée déjà rencontrée ou une variante.
Pour d'autres, je suis obligé de réfléchir, de faire une analyse (sans garantie de réussite), pour d'autres encore, je sèche lamentablement, à cause de sa complexité encore jamais rencontrée.
Je suis persuadé qu'en Maths, c'est une problématique similaire qui est à l’œuvre dans l'intuition, mieux elle a été (et continue à) être nourrie, meilleure et plus efficace elle est...
Je ne sais pas si je suis arrivé à être compréhensible : je l'espère.
@+
Arx Tarpeia Capitoli proxima...
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#5 02-11-2022 23:07:00
- rareStrophe
- Membre
- Inscription : 26-06-2022
- Messages : 82
Re : Difficulté des exercices de la collection Phare MPSI
Je me permets de citer la préface du livre Les Clefs pour l'X que je trouve très juste:
En mathématiques, il y a deux façons d'embrasser les contenus : soit en apprenant, soit en comprenant. Mais il n'y en a qu'une de les mettre en œuvre : en faisant des exercices. On conviendra en effet que la résolution d'exercices permet de tisser petit à petit les liens invisibles par lesquels tiennent les idées en mathématiques. Les exercices donnent chair aux théorèmes; en incarnant ses hypothèses, l'exercice met en évidence la puissance du théorème mais, de façon paradoxale, il souligne parfois son inadéquation à la résolution d'un problème particulier : il faut alors créer soi-même le petit bout de chemin qui permette d'aller jusqu'à la théorie générale. Les hypothèses aussi sont souvent cachées : les mettre en évidence est en soi un travail qui est loin d'être facile.
Au travers de la pratique des exercices, l'étudiant développe le processus mental de la résolution : l'accumulation d'expériences, la création de moteurs d'analogie, la mise en place d'un réseau de communication entre les concepts, et ainsi de suite. La pratique régulière d'exercices aboutit à terme à ce que l'étudiant sépare automatiquement les aspects techniques des concepts plus profonds : libéré de la crainte de la technicité, l'activité de réflexion se concentre alors sur la compréhension et la démonstration, et par extension sur la relation avec l'examinateur.
Une difficulté souvent sous-estimée, c'est de mesurer… la difficulté d'un exercice. Cela se comprend bien : savoir d'un exercice qu'il est difficile, c'est avoir presque instantanément exploré les voies faciles qui mènent à sa solution. Le rôle de la pratique préalable des exercices est de faire ce travail avec une rapidité souvent déconcertante pour le sujet lui-même : un peu comme un maître des échecs ne pense même pas aux deux prochains coups, mais peut se projeter dans la stratégie qui va guider les coups suivants. Bien sûr, l'intérêt de cette capacité est évident : si l'exercice tombe sous le coup d'une méthode éprouvée, elle sera reconnue sans peine et sans fatigue, ce qui permettra de se concentrer sur les difficultés techniques, s'il y en a. S'agissant de l'X, il n'est pas improbable que l'exercice soit ardu, mais ce serait une erreur que de le postuler. La méthode est toujours d'examiner froidement le problème afin d'aider son cerveau à se mettre en position de faire les essais nécessaires. Si l'exercice est difficile, le cerveau se placera de lui-même dans la configuration la plus apte pour le résoudre.
Tout cela suppose une pratique régulière et sérieuse. […]
Un conseil pour travailler ces exercices : le faire tout au long de l'année. Résoudre un exercice est loin d'être un pensum. C'est au contraire une source de plaisir. Bien sûr, la recherche infructueuse peut être cause d'une souffrance, mais cette souffrance (toute relative !) s'évanouit dès que l'on franchit avec succès les obstacles posés par l'énoncé. Le sentiment de triomphe ressenti la première fois que l'on résout un exercice difficile ne s'oublie pas.
Une dernière idée : chercher un exercice un jour et, en cas d'insuccès, laisser passer une nuit pour se remettre au travail sur le même exercice le lendemain. En cas de nouvel insuccès seulement, consulter la solution.
Il va de soi qu'il ne faut pas hésiter à varier les niveaux de difficulté et faire régulièrement, même en visant l'X, des exercices provenant des Mines ou de Centrale, par exemple. On en trouve aisément des annales mais nous ne saurions trop vous conseiller de consulter la RMS (Revue de la filière Mathématiques), qui publie d'une année sur l'autre un millier d'exercices posés aux concours l'année précédente. […]
Dernière modification par rareStrophe (02-11-2022 23:08:46)
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#6 03-11-2022 04:14:53
- Spike
- Invité
Re : Difficulté des exercices de la collection Phare MPSI
Merci beaucoup pour vos réponses.
Donc, selon vous Yoshi et Fred, même pour un bon étudiant de prépa MPSI-MP, il est tout à fait normal de ne pas être en mesure de résoudre des exercices atypiques aux solutions originales (par exemple des oraux de khôlles des concours X-Mines, ou des exercices "à astuce" de planches de TD de "grandes prépa"), si l'on a jamais rencontré auparavant un exercice similaire.
Pourrait-on dire, dans ce cas, que les élèves de prépa ayant eu la chance d'être scolarisés dans des grands lycées (llg, h4, stan...), et qui performent généralement très bien en sup et parfois en spé, se différencient surtout des autres bons élèves de "province" ou de l'étranger (eux-même souvent majors de leurs lycées respectifs) non pas par un talent inné et une intuition mathématique supérieurs (à l'exception peut-être d'un génie ou deux par classe), mais par le fait qu'ils aient, parfois dès la seconde, reçu une formation spéciale et vu passer énormément d'exercices typiques posés en prépa?
Bien Cordialement,
Spike
#7 03-11-2022 14:03:43
- Fred
- Administrateur
- Inscription : 26-09-2005
- Messages : 7 181
Re : Difficulté des exercices de la collection Phare MPSI
Re
Forcément quand tu mets les meilleurs élèves ensemble (car dans les plus grands lycées parisiens il y a sélection dès le lycée) que tu les fais travailler bien au delà du programme usuel tu creuses les écarts.... Maintenant je veux bien croire que les gens qui rentrent à Ulm ou à l'X dans les 50 premiers ont vraiment quelque chose de plus. Mais la plupart des étudiants rentrants dans les meilleures écoles sont simplement d'excellents étudiants capables d'assimiler et de retenir très rapidement une quantité folle d'informations. Et c'est déjà extraordinaire !
F
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