Exercices corrigés - Endomorphismes des espaces euclidiens - problèmes

Exercice 1

- Endomorphismes anti-symétriques [Signaler une erreur] [Ajouter à ma feuille d'exos]

Enoncé

Soit $E$ un espace euclidien de dimension $n\geq 2$. Un endomorphisme $u\in\mathcal L(E)$ est dit antisymétrique si $$\forall x,y\in E,\ \langle u(x),y\rangle=-\langle x,u(y)\rangle.$$ Le but de l'exercice est d'étudier certaines propriétés des endomorphismes antisymétriques.

Montrer que $u$ est antisymétrique si et seulement si, pour tout $x\in E$, $\langle x,u(x)\rangle=0$.
Montrer que $u$ est antisymétrique si et seulement si sa matrice dans toute base orthonormale est antisymétrique.
On fixe pour la suite de l'exercice un endomorphisme antisymétrique $u\in\mathcal L(E)$. Démontrer que $\textrm{Im}(u)=(\ker u)^\perp$.
Soit $F$ un sous-espace de $E$ stable par $u$. Démontrer que $F^\perp$ est stable par $u$.
Montrer que $\ker(u)=\ker(u^2)$.
Démontrer que le spectre de $u$ est soit vide, soit restreint à $\{0\}$.
Montrer que $u^2$ est diagonalisable et que ses valeurs propres sont négatives.
Soit $F$ un espace euclidien, $v\in\mathcal L(F)$ antisymétrique tel que $v^2=-\alpha^2 Id_F$, où $\alpha>0$. Démontrer qu'il existe une base orthonormale de $F$ telle que la matrice de $v$ dans cette base soit de la forme $$A(\alpha)=\left( \begin{array}{cccc} J(\alpha)&0&\dots&0\\ 0&J(\alpha)&0&\vdots\\ \vdots&\ddots&\ddots&\vdots\\ 0&\dots&\dots&J(\alpha) \end{array}\right)$$ où $$J(\alpha)=\left(\begin{array}{cc} 0&-\alpha\\ \alpha&0 \end{array}\right).$$
En déduire qu'il existe une base orthonormale de $E$ dans laquelle la matrice de $u$ a pour forme $$\left( \begin{array}{ccccc} A(\alpha_1)&0&\dots&0&0\\ 0&A(\alpha_2)&0&\vdots&\vdots\\ \vdots&\ddots&\ddots&\vdots&\vdots\\ 0&\dots&\dots&A(\alpha_r)&\vdots\\ 0&\dots&\dots&\dots&0 \end{array}\right).$$

Indication

Corrigé

D'une part, il est clair que si $u$ est antisymétrique, alors $\langle u(x),x\rangle=-\langle x,u(x)\rangle=-\langle u(x),x\rangle$ et donc $\langle u(x),x\rangle=0$ pour tout $x\in E$. Réciproquement, supposons que $\langle u(x),x\rangle=0$ pour tout $x\in E$ et considérons $x,y\in E$. Alors on a $$\langle u(x+y),x+y\rangle=0$$ et aussi \begin{eqnarray*} \langle u(x+y),x+y\rangle&=&\langle u(x),x\rangle+\langle u(x),y\rangle+\langle u(y),x\rangle+\langle u(y),y\rangle\\ &=& \langle u(x),y\rangle+\langle u(y),x\rangle \end{eqnarray*} ce qui prouve que $$\langle u(x),y\rangle=-\langle u(y),x\rangle$$ et donc que $u$ est antisymétrique.
Soit $u\in\mathcal L(E)$, soit $(e_1,\dots,e_n)$ une base orthonormale de $E$ et soit $A$ la matrice de $u$ dans cette base. Alors on a $a_{i,j}=\langle u(e_j),e_i\rangle$ pour tous $i,j$. Supposons désormais que $u$ est antisymétrique. Alors pour tout couple $(i,j)$, on a $$a_{i,j}=\langle u(e_j),e_i\rangle=-\langle u(e_i),e_j\rangle=-a_{j,i}$$ et la matrice $A$ est bien antisymétrique.
Réciproquement, supposons que $A$ est antisymétrique, et prouvons que $u$ est bien antisymétrique. On sait que l'on a $\langle u(e_j),e_i\rangle=-\langle u(e_i),e_j\rangle$. Fixons maintenant $x,y\in E$ et écrivons les $x=\sum_{i=1}^n x_i e_i$ et $y=\sum_{i=1}^n y_i e_i$. On a alors \begin{eqnarray*} \langle u(x),y\rangle&=&\left\langle \sum_{j=1}^n x_j u(e_j),\sum_{i=1}^n y_i e_i\right \rangle\\ &=&\sum_{i,j=1}^n x_j y_i\langle u(e_j),e_i\rangle\\ &=&-\sum_{i,j=1}^n x_j y_i\langle e_j,u(e_i)\rangle\\ &=&-\left\langle \sum_{j=1}^n x_j e_j,\sum_{i=1}^n y_i u(e_i)\right \rangle\\ &=&-\langle x,u(y)\rangle \end{eqnarray*} ce qui prouve bien que $u$ est antisymétrique.
Pour démontrer que $\textrm{Im}(u)=(\ker u)^\perp$, il suffit de démontrer que $\textrm{Im}(u)\subset (\ker u)^\perp$, puis de remarquer que ces deux sous-espaces ont la même dimension, qui vaut $\dim(E)-\dim(\ker(u))$. Prenons donc $y\in \textrm{Im}(u)$, que l'on écrit $y=u(x)$ et soit $z\in\ker(u)$. Alors on a $$\langle y,z\rangle=\langle u(x),z\rangle=-\langle x,u(z)\rangle=0$$ et donc on a bien $y\in (\ker u)^\perp$.
Soit $x\in F$ et $y\in F^\perp$. Alors on a $$\langle u(y),x\rangle=-\langle y,u(x)\rangle=0$$ puisque $y\in F^\perp$ et $u(x)\in u(F)\subset F$.
On a toujours $\ker(u)\subset \ker(u^2)$. Réciproquement, soit $x\in\ker(u^2)$. Alors $$\|u(x)\|^2=\langle u(x),u(x)\rangle=-\langle x,u^2(x)\rangle=0$$ et donc $x\in \ker(u)$.
Si le spectre de $u$ n'est pas vide, soit $\lambda$ une valeur propre de $u$ et $x$ un vecteur propre (non-nul) associé. Alors $$\langle u(x),x\rangle=0$$ alors que l'on a aussi $$\langle u(x),x\rangle=\lambda \|x\|^2$$ et donc $\lambda=0$.
Il est facile de prouver que $u^2$ est diagonalisable, car en effet, $u^2$ est un endomorphisme symétrique : pour tous $x,y\in E$, $$\langle u^2(x),y\rangle=-\langle u(x),u(y)\rangle=\langle x,u^2(y)\rangle.$$ Soit maintenant $\lambda$ une valeur propre de $u^2$, de vecteur propre associé $x$. Comme ci-dessus, on a $$\langle u^2(x),x\rangle=\lambda \|x\|^2.$$ D'autre part, $$\langle u^2(x),x\rangle=-\langle u(x),u(x)\rangle=-\|u(x)\|^2,$$ ce qui prouve bien que $\lambda\leq 0$.
On va procéder par récurrence sur la dimension de $F$. Remarquons déjà que la dimension de $F$ ne peut pas être égale à 1. En effet, en dimension 1, un endomorphisme antisymétrique ne peut être que nul (regarder par exemple la matrice). Supposons donc que $F$ soit de dimension 2. Soit $e_1$ un vecteur unitaire de $F$, et soit $e_2=\frac 1{\alpha} v(e_1)$. On a alors $$v(e_2)=\frac 1{\alpha}v^2(e_1)=-\alpha e_1.$$ Ainsi, la matrice de $v$ dans la base $(e_1,e_2)$ est bien $J(\alpha)$. Reste à voir que $(e_1,e_2)$ est une base orthonormée. On a en effet $$\langle e_1,e_2\rangle=\frac 1\alpha \langle e_1,v(e_1)\rangle=-\frac 1\alpha \langle v(e_1),e_1\rangle=-\langle e_2,e_1\rangle$$ et donc $\langle e_1,e_2\rangle=0$. D'autre part, $$\|e_2\|^2=\frac {1}{\alpha^2}\langle v(e_1),v(e_1)\rangle=\frac{-1}{\alpha^2}\langle e_1,v^2(e_1)\rangle=\|e_1\|^2=1.$$ Supposons désormais le résultat démontré pour toute dimension inférieure ou égale à $p-1$ et démontrons-le en dimension $p$. Soit $(e_1,e_2)$ une famille orthonormale de $F$ définie comme dans le cas de la dimension 2. Posons $G=\textrm{vect}(e_1,e_2)^\perp$, qui est stable par $v$, et $v_{|G}$ est un endomorphisme antisymétrique de $G$. Par l'hypothèse de récurrence, on peut trouver une base orthonormale $(e_3,\dots,e_{p})$ de $G$ telle que la matrice de $v_{|G}$ ait la bonne forme. La matrice de $v$ dans la base orthonormale $(e_1,\dots,e_p)$ de $v$ a alors la forme voulue.
Notons $-\alpha_1^2,\dots,-\alpha_r^2$ les valeurs propres non-nulles de $u^2$, et $E_i$ les espaces propres associés. On sait que $$E=E_1\oplus\dots\oplus E_r\oplus\ker(u^2)$$ et la somme est orthogonale. On réduit ensuite $u$ dans chaque sous-espace propre de $u^2$ en utilisant la question précédente, et puisque $\ker(u)=\ker(u^2)$, $u$ est l'endomorphisme nul sur $\ker(u^2)$. En recollant toutes ces bases orthonormales, on obtient la réduction voulue pour $u$.